L'insouciance (fragment 6) (appeau vert) Un petit sifflet de bois peint retenu par une ficelle au cou de l’enfant. Debout sur les rochers, face au torrent. Vacarme. Plus tard il remontera le cours d’eau - ou le descendra -. Il est sur la berge, sifflet en main. Il bat les broussailles. Il s’écorche aux orties, mais ne dit rien : c’est un grand aventurier qui explore la forêt équatoriale. Il épie, entre les branches, les baigneurs. Ceux-là sont trop bruyants pour être d’ici. Il mime un geste de mitraillette. Les corps tombent en grandes éclaboussures. Un ballon roule sur la plage. Une jeune femme en maillot rose, dans le lit jusqu’à la taille, lisse ses cheveux. Elle semble seule. Elle sort en poussant sur l’eau, laissant les ondes s’ouvrir derrière elle. C’est un maillot une pièce, comme il en voit souvent à la piscine. En claudiquant sur les galets, elle avance et se baisse pour prendre sa serviette. Il retient son souffle son cœur bat. Il pose son sifflet entre ses lèvres. D’une main elle fait glisser la bretelle rose. Le dos est nu. Elle se penche. Le sifflet est humide dans la bouche. Il tremble. Le maillot est à terre, abandonné comme la peau d’une mue. Il souffle d’un trait dans le tuyau de bois vert. Stridence. Il voit le ralentit du corps qui pivote dans sa direction et les mains pudiquement qui tentent de masquer la nudité. Il siffle maintenant sans s’arrêter, devançant l’écho dans la combe, affolant sa proie. |
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