> [re] vénus
 

L’étreinte

Regarde d'abord cette roche suspendue au flanc de la falaise et puis cette dispersion des masses de pierre sous l’aplomb menaçant et l'immense débâcle de ces rocs entraînés en contrebas sur le rivage.
Regarde, cette coulée noire et brune, l’anthracite de ces blocs veinés de jaune. Marques et saignées dans la peau de la pierre, veines de micas lustrée par les embruns.
Regarde dans le chaos de ce relief lunaire, la mousse de l’écume qui affleure, enlaçant les saillies de pierre.

La mer qui gagne, vague après vague, le sombre champ minéral. L’onde enfle, va et vient, s’immisce plus avant dans la chair du rivage. Le ressac, bientôt, par assauts répétés, cogne et reflue sur la plate-forme à nu, qu’il submerge enfin.

Il y a, dans la montée de la marée, dans ce mouvement fluide d’engloutissement du solide, quelque chose d’une étreinte amoureuse, quelque chose, aussi, du geste de la peinture, de l’acte sensuel et violent du recouvrement, produit par le balayage de la brosse sur le rugueux de toile, dans la résistance des blancs sous les nappes de couleur et dans le dégorgement humide du pigment qui …

L’étreinte ne se relâche que lorsque le tableau est à marée haute.