L'insouciance (fragment 1)

Un rire proche couvrant le léger ressac, celui d’une jeune fille assise, appuyée sur l’épaule de son ami. Un chien jappe plus loin en jouant avec un morceau de bois que vient de lui lancer un petit garçon

Une pomme croquée, assis sur la plage en attendant la tombée du jour sur la mer étale. Je vois des dents qui s’enfoncent dans la chair, la main qui fait tourner le fruit, l’abouchement à nouveau.

Une pomme fendue en deux : son sourire, la tête jetée en arrière. Plein soleil. Sur la plage d’hiver, la lumière frise. Je pense à ce plan de « contes cruels de la jeunesse » où un jeune homme, en gros plan, croque lentement dans une pomme. Lentement, insupportablement. Il n’y a pas de lumière dans cette scène. Il y fait noir, il fait nuit (dans mon souvenir tout au moins).

Lente descente du soleil comme une grosse pomme. Le ciel est griffé de lignes blanches et jaunes, croisant le fer. Doucement la lumière effectue un virage, le ciel infuse.

La lanterne du phare au bout de la digue vient de s’allumer, le trognon de pomme rejoint les vagues au moment même ou le gros disque solaire plonge à l’horizon. Une ligne verte (presque fluo) ourle la masse grise de l’eau. Le chien et l’enfant sont repartis, le couple s’est relevé et s’enfonce dans la pénombre comme un seul corps.

Dans l’obscurité, maintenant, seule la lueur de la braise, au bout de ma cigarette.


 

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