Chaise avec coin
de graisse (1963), sculpture constituée d'une chaise en bois
dont le siège et une partie du dossier sont recouverts d’un
bloc de graisse, est un exemple assez évident de ce processus.
La forme de ce bloc,
un dièdre, ainsi que la substance de la graisse figée,
matérialisent l’idée d’un corps assis. Chaise
+ coin = fonction + concept.
La chaise est l’enveloppe
en négatif d’une personne assise, prothèse ou socle
du corps plié, elle représente sans doute le mieux ce
qui sépare l’homme moderne de l’homme primitif. Tout
en affirmant le principe de l’assise, la pente lisse de graisse
(qui rejoint le dossier au siège), interdit définitivement
son utilisation en tant qu’objet.
La rupture avec l’angle droit (notion récurrente chez Beuys),
l’opposition des matériaux (artificiel/naturel), la combinaison
des procédés techniques visibles (façonnage, modelage,
assemblage)…
Tout ici pointe le double mouvement paradoxal du rationnel et de l’irrationnel
qui traverse et fonde l’humanité.