Le
regard court dans la salle. Une ligne bleue, un ruban déposé sans y
prêter attention, sur l’étagère, et qui à présent sinue entre les
images, contre les papiers, les objets en vrac, retient l’attention
un moment. Des impressions que mon œil saisit, sans que mon esprit les
comprenne, s’estompent dans l’instant. L' oeil est
un des organes des sens qui contrairement à l’oreille reçoit aussi
bien qu’il renvoie. Je reçois des « stimuli » du monde qui m’entoure et
les restitue par un regard fugitif, une vision
plus précise, une observation et lui signifie mon ressenti.Le peintre qui
traduit en image une telle impression, se concentre sur l’objet, le
dissèque au niveau de la perspective, de la lumière, dans les
nuances de la couleur, dans sa position dans l’espace et dans son
rapport avec les formes environnantes.
Si nous
parcourons sur plusieurs années l’œuvre de Philippe Agostini, nous
constatons que l’artiste entretient une communication non
verbale avec les formes de la réalité. Des années 90 au début des
années 2000 les fragments de son atelier composent une mosaïque de
petits carrés. Ainsi apparaît un assemblage de
papiers dont les bords ont des contacts irréguliers, chaque feuille
représentant un monde en soi.
Objets d’étude,
modèles, représentations de l’histoire de l’art peuplent l’atelier du
peintre et pénètrent dans le champ de sa perception.
Le regard transmet cette impression du corps jusqu’à la main qui
traduit cette perception en image. Chaque morceau carré de cette
mosaïque est conçu en soi comme une entité. Au fur et à mesure
que le regard parcourt le motif, les feuilles prennent place et
composent un tout qui naît des parties isolées.
Philippe
Agostini a nommé ce procédé « Eclats ». En français, cela
signifie aussi bien fragments de verre, mais aussi brillance, lumière,
éclair, explosion. Cette intention recouvrant ce geste précis donne
soudain une signification à cette démarche.
Si le peintre
peut conduire dans son atelier un dialogue avec la matière, il est
d’autres situations qui font apparaître une autre singularité
de sa pratique, comme par exemple, quand flânant dans un paysage,
sur la route, en voiture, s’impriment dans la mémoire des moments, des
assemblages de mouvements, de formes et de couleurs, qu’il
engrange pour y revenir plus tard. Temps et espace cadrent notre
existence, c’est là que la mémoire prend toute sa place. Des couleurs
viennent au premier plan, des formes changent. Des détails
se détachent de leur environnement et le font disparaître. Dans les
« Vues », ainsi qu’il a nommé ses travaux, le rouge d’un camion de
livraison, contraste avec le vert de la campagne
française. Sa forme initialement rectangulaire bouge et envahit
l’espace d’une feuille toute entière pour y agir en couleur pure. Et
si nous avançons dans le temps, nous trouvons, deux années
plus tard, dans une sphère de formes sans objet, celle d’une matière
primaire qui n’est pas visible dans le monde qui nous entoure mais que
notre esprit peut cependant atteindre par abstraction
et réflexion.
La mémoire a dans
« Structures » une nouvelle figure, une autre facette. Nourrie par les
œuvres des maîtres présents dans
l’atelier, comme par un livre d’images universel, la mémoire s’est
frayée un chemin dans son imaginaire personnel et a débouché sur une
autre la forme pure. Car ces collages, constitués de
chutes, de rognures de bandes découpées dans des œuvres antérieures
recomposent à présent un ensemble nouveau.
La capacité
humaine de se souvenir se situe sur une base matérielle (concrète). Le
philosophe français Henri Bergson a proposé une nouvelle
approche du dualisme existant depuis l’Antiquité entre esprit et
matière. Ce n’est pas seulement la présence d’une forme dans l’espace,
le visible, qui fait la différence entre le monde des
objets, réalité banale, et l’univers, c’est aussi et surtout un
acte inscrit dans le temps. La matière existe. La matière c’est du
concret, c’est du présent. L’esprit en mouvement
atteint au-delà du présent le passé et réactive ce qu’il a mis de
côté et le matérialise par cet accès à la conscience. Quand mon regard
rencontre la matière, l’esprit mis en mouvement convoque
le passé pour le mettre au contact du présent, prend acte de cet
éclairage et produit du nouveau. Les structures de couleurs produites
dans les œuvres de Philippe Agostini procèdent de cette
prise de conscience. La couleur est porteuse du dualisme qui passe
de la perception à l’expression à travers un support matériel. Les
valeurs de la couleur que nous voyons dans les collages
entrent en résonance et pénètrent visuellement dans notre conscience
qui les nomme alors leur conférant ainsi une dimension temporelle.
Bleu, marron, vert existent dans mon imagination et dans la
matérialité des pigments qui font la pâte de la peinture.
« Conversation
avec la plus douce », Qui est-elle cette douceur ? Et qu’est-ce ? Dans
les œuvres les plus récentes de
Philippe Agostini, s’envisagent des figures construites par couches.
Apparemment elles dialoguent ainsi que le suggère le titre. Un dialogue
silencieux que l’observateur (le regardeur) n’entend
pas mais un dialogue visible lorsqu’il en prend conscience.
Conscience de la couleur, des recouvrements, des plis qui rendent compte
d’une succession, succession dans le processus de la peinture,
de la perception, dans le souvenir. C’est un dialogue avec la
peinture que poursuit l’artiste. Peinture, c’est aussi bien la couleur
au service de la main du peintre, que la peinture tant dans
son expression actuelle que dans son histoire et dans sa position au
sein de la culture des hommes.
« Entre les
plis » nous nous trouvons à un moment de tension extrême, de suspension
entre ce qui est passé et ce qui va venir, au
moment fugace de l’ici et maintenant.
Le ressenti
personnel, l’impression, le souvenir et la mémoire commune se glissent
dans les œuvres de Philippe Agostini et nous font
l’offrande d’un instant spirituel dans le regard conscient.
Der
Blick schweift durch den Raum. Eine blaue Linie, ein Paketband, das ich
achtlos auf dem Regal abgelegt habe und das sich nun um Bilder,
Papiere, lose Gegenstände schmiegt, fesselt ihn für einen Moment.
Eindrücke, die mein Auge erfasst, die mein Geist aber nicht wahrnimmt,
verschwimmen im Augenblick. Das Auge ist eines der
Sinnesorgane, das entgegen dem Ohr sowohl aufnimmt, als auch
entsendet. Ich empfange Reize aus meiner Umwelt und erstatte ihr dafür
einen flüchtigen Blick, ein genaueres Hinsehen, ein Beobachten
und gebe ihr Zeichen meines inneren Empfindens.
Der Maler, der
einen solchen Eindruck bildhaft fixiert, richtet seine Konzentration auf
das Objekt, seziert es auf Perspektive, Lichteinwirkung,
Farbnuancen, Position im Raum und im Verhältnis zu umliegenden
Formen.
In den Werken
Philippe Agostinis sehen wir in einem Querschnitt durch mehrere Jahre
eine Entwicklung dieser nonverbalen Kommunikation des
Künstlers mit der gestalthaften Realität. Mosaikhaft aus kleinen,
quadratischen Papieren setzen die Arbeiten der 1990er bis frühen 2000er
Jahre Fragmente seines Ateliers zusammen. Dabei entstehen
Brüche an den Rändern des einzelnen Blattes, welches für sich
genommen schon eine Welt vergegenwärtigt. Studienobjekte, Modelle,
kunsthistorische Vorbilder, die den Arbeitsraum des Malers
bevölkern, dringen in seine Wahrnehmung ein. Das Schauen leitet
diesen Eindruck dann durch den Körper an die Hand, die dem Bild
gewordenen Blick Ausdruck verleiht. Jeder Papierstein dieses
Bildmosaiks entsteht in einer Fokussierung und ist für sich
abgeschlossen. So wie der Blick durch den Raum weiterwandert, so reihen
sich die Blätter aneinander und geben ein Gesamtes wieder, das
sich aus Einzelnen zusammenfügt. Éclats hat Philippe Agostini diese
Fixierungen genannt. Zu deutsch bedeutet das soviel wie Scherbe,
Splitter, aber auch Glanz, Leuchten, Knall. Das akute
In-Erscheinung-Treten des Äußeren.
Kann der Maler im
Atelier seinen Dialog mit der formhaften Materie direkt führen, so sind
es andere Situationen, die eine weitere menschliche
Besonderheit zutage treten lassen. Beim Flanieren durch die
Landschaft, während der Fahrt im Auto prägen sich Momente, Konglomerate
aus Bewegung, Form und Farbe in das Gedächtnis ein, das sie
speichert und abrufbar hält für einen späteren Zeitpunkt. Dehnen
sich Zeit und Raum zwischen diesen beiden Punkten auf der Lebensachse
aus, so erweitert sich auch die Erinnerung. Farben treten in
den Vordergrund, Formen verändern sich, Details treten aus ihrem
Umfeld hervor und lassen dieses verschwinden. In den Blicken, die mit
Vues titulierte Arbeit, setzt sich das Rot des Lieferwagens
in Kontrast zum Grün der französischen Felder. Seine rechteckige
Gestalt siedelt über und nimmt Raum ein, ein ganzes Blatt, um dort als
reiner Farbwert zu wirken. Und gehen wir nur ein bisschen
weiter, treten wir zwei Jahre später ein in eine Sphäre formloser
Gestalt, der primären Materie, die uns in der Welt nicht sichtbar wird,
die unser Geist durch Abstraktion und Reflexion jedoch
wieder erreichen kann.
Das
Gedächtnis hat hier, in den Structures - Struktutren eine neue Stellung
eingenommen. War es im Atelier
noch in Werken alter Meister repräsentiert, ein universal gewordenes
Bilderbuch und hat es sich in der persönlichen Erinnerung Weg gebahnt,
ist es nun selbst Form geworden. Denn die Collagen
bestehen aus Resten, übriggebliebenen Papierschnipseln,
abgeschnittenen Rändern vormals entstandener Bilder und gruppieren sich
zu einem Neuen zusammen. Das menschliche Erinnerungsvermögen hat
seinen Sitz auf einer materiellen Basis, im Nervenzentrum des
Menschen. Der französische Philosoph Henri Bergson hat dabei dem seit
der Antike bestehenden Dualismus zwischen Geist und Materie
eine neue Wende gegeben. Nicht allein die räumliche Erscheinung, das
Sichtbarwerden macht dabei den Unterschied zwischen gegebener Dingwelt,
allgemeiner Lebensrealität und geistigem, unsichtbaren
Universum aus, sondern ein zeitlicher Akt. Die Materie ist. Die
Materie veranschaulicht und besteht in Gegenwart. Der Geist ist in
Bewegung, er reicht über die Gegenwart in die Vergangenheit
zurück und kann Abgelegtes vergegenwärtigen, repräsentieren durch
die Bewusstwerdung. Trifft mein Blick auf das Materielle, bringt der
bewegte Geist das eben Vergangene in die aktuelle Begegnung
mit ein, lässt damit Erkenntnis zu und ein zukünftig Neues
entstehen. Die Strukturen, die die Farbe in Philippe Agostinis Bildern
erstellt, stammen aus dieser geistigen Bewusstwerdung. Farbe an
sich trägt den Dualismus zwischen wahrgenommener und zum Ausdruck
gebrachter Geistigkeit und materiellem Träger aus. Die Farbwerte, die
wir auf den Collagen erblicken, treten in Zusammenhang,
setzen sich voneinander ab und dringen visuell in unser Bewusstsein,
das sie mit Worten bezeichnet, die ihnen eine zeitliche Dimension
verleihen. Blau, Braun, Grün existieren in meiner
Vorstellung und in der Form, der aus Pigmenten und Öl
zusammengesetzten Malpaste.
Conversations
avec la très douce, Konversationen mit der sehr zarten. Wer ist sie,
diese Zartheit? Oder was? Aus Schichten zusammengesetzte
Figuren sind einander auf den jüngsten Leinwandarbeiten Agostinis
zugewandt. Offenbar im Dialog, so lässt der Titel vermuten. Ein stiller
Dialog, für den Betrachter nicht hörbar, aber sichtbar,
wenn er sich bewusst wird. Bewusst der Farbe, der Schichten, der
Falten, die ein Nacheinander darstellen. Ein Nacheinander im Malprozess,
in der Wahrnehmung, der Erinnerung. Es ist ein Dialog mit
der Malerei, die der Künstler führt. Peinture ist sowohl die Farbe,
Dienerin der Hand des Malers als auch die Malerei in ihrer gegenwärtigen
Ausformung, sowie in ihrer Geschichte und Position
innerhalb der menschlichen Kultur. Entre les plis – Zwischen den
Falten befinden wir uns im Moment der höchsten Spannung, der
Überlagerung von Vergangenem und noch Werdendem, dem flüchtigen
Moment des Hier und Jetzt.
Eigenes
Empfinden, Eindruck, Erinnerung und allgemeines Gedächtnis fließen in
die Werke Philippe Agostinis ein und bescheren uns im Moment der
bewussten Betrachtung ein geistiges Erleben.
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