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> notes sur clichés (photo revisitée)

32 bis / Toutes ces histoires se confondent et j'imagine que toutes n'en font qu'une seule. Le récit d'une vie comme dans un album de famille. Il y a des nourrissons, des chiens, des saisons, des voyages, des paysages et des portraits, des coups de lumière, des figures floues, des parents, des fiancés, des lieux, des gestes…

Il y a cette pièce photographiée depuis le seuil. Au pied de la porte vitrée - dont seul le chambranle de bois est encore en place - le sol est jonché de débris de plâtre. Au-delà du jeu de cadres vides des battants de cette porte, une pièce dans la semi pénombre témoigne du même état de délabrement. Dans un coin, le croisillon en contre-jour d'une fenêtre. " C'était là ", est l'expression qui me vient sans réfléchir. Un lieu déserté, abandonné, en ruine qui fut la maison vivante de quelqu'un, d'une famille. L'appartement était vaste, clair et cossu. Des tapis et des lustres, des meubles cirés surmontés de bibelots de porcelaine, de compotiers sur des napperons ouvragés, des divans profonds, des fauteuils de velours cramoisis, de lourds rideaux retenus avec des cordons. Et puis des fruits sur la table et des odeurs de cuisson venant de la cuisine, le son d'un piano hésitant, des voix d'enfants, le cliquetis des couverts…[...]

Je sais que c'est idiot et naïf, mais il y a peu, mettant en page (pour le livre de Patrick F.) les photographies d'un pavillon de soin abandonné de l'hôpital psychiatrique de Voltera, je m'étais déjà fait cette réflexion sur les souvenirs des bruits qu'un lieu conserve, bien après sa fonction… Tous les lieux à l'abandon se ressemblent, tous n'ont pourtant pas la même mémoire sonore.